Le mois de novembre était arrivé rapidement. Nous étions partis tôt le matin mais la pluie nous avait surpris bien avant midi. A la fin de l’après-midi seulement, nous avions planté notre tente. Nous n’étions pas à l’endroit exact que nous avions imaginé, mais dans tous les cas, nous étions dans la bonne forêt. Quand la pluie s’arrêterait, on sortirait : la lune de sang allait comme tous les ans apparaître. On l’appelait la lune du chasseur ou « de sang » car elle était plus rouge cette nuit-là. Voilà pourquoi les chasseurs sortaient. Cette année elle était arrivée tard. Elle éclairait davantage. Nous voulions y aller car la légende affirmait que des choses extraordinaires ou maléfiques arrivaient à cette occasion.
- Lilly réveille-toi ! dit Matéo.
- Tais-toi et monte cette tente ! le réprimanda Maé. Baptiste donne-moi les sacs de couchage et les tapis de sol, ajouta-t-il.
- Oui chef ! Dit Baptiste et on éclata tous de rire.
Plus tard on s’endormit rapidement. Au réveil, le brouillard cachait l’horizon. Je sortis faire pipi derrière un buisson. À mon retour, je vis que la tente était vide, personne... J’y entrai malgré tout. Un hurlement retentit au-dehors et j’en sortis à toute vitesse. Personne, pas de trace de pas, rien du tout, à peine le bruit de la brise dans les arbres. La lune était haute dans le ciel sans étoile. Elle était rouge. Je me souvins qu’on avait eu l’idée de camper dans un champ au milieu d’une forêt, y avait personne aux alentours. Je me retournai pour rentrer à nouveau dans la tente mais je ne vis plus rien même pas la marque de l’herbe écrasée. A la place, il y avait une tache blanche bizarre comme… un fantôme, un fantôme qui n’avait aucune ressemblance avec un humain, comme une tache, mais jolie. Je m’approchai doucement d’elle jusqu’à m’en envelopper toute entière. Une douce chaleur m’envahit alors au lieu de la froideur hivernale de la nuit. Et puis tout à coup, les sons de la forêt se firent nets, un groupe de cerfs se promenant dans la forêt, des pas précipités, une meute de loups affamés qui venaient de trouver des proies qui... qui... mes amis sont en danger. La tache qui m’enveloppe est devenue noire avant de disparaitre. Mes amis sont en danger. Je ne vais pas vous mentir en vous disant qu’à ce moment-là, une vague de courage se propagea en moi. Le fait simple de savoir que des êtres chers étaient en péril suffit à me désarçonner.
J’avais froid, très froid mais je me précipitai quand même dans les profondeurs de la forêt sombre juste éclairée par la lune rouge. Je courrais à présent, quelqu’un venait en sens inverse poursuivit par des formes plus petites qui criaient.
- Lilly cours ! Cria Maé.
Me retournant je me mis à courir pour échapper au loup. Comme par hasard, le cour de SVT me revint alors en mémoire :
« Les animaux carnivores terrestres tel que le loup et l’ours sont souvent à terre et ne grimpent pas aux arbres car leur but est de se nourrir rapidement. La vitesse est donc privilégiée »
- Maé ! Grimpe à un arbre vite ! Dis-je, tout en courant.
Un grand chêne se dressa devant nous. J’attrapai son tronc sans ralentir, puis l’escaladai. Maé fit de même, les loups arrivaient à notre hauteur.
- Vite! Cria Maé. Les loups venaient de m’arracher une chaussure.
On s’arrêta à deux mètres cinquante du sol car les branches devenaient trop fines et ne supportaient pas notre poids. Abattus, les loups partirent à la recherche d’une autre proie. Un hurlement suivi d’autres hurlements me terrorisèrent. Puis Maé me tapota l’épaule.
- Quoi ? Dis-je d’une voix tremblante.
- Tu dois mourir ! Dit-elle comme si elle venait de m’apprendre qu’elle m’avait emprunté un stylo.
Puis elle me poussa de l’arbre. Au moment où je touchai le sol, des loups par dizaines se jetèrent sur moi, mêlant sang, fourrure, crocs et griffes.
- Ahhhh !!! Je me réveillai alors dans la tente prise de panique… et seule... Tout ça n’était qu’un rêve.